Transaction rédigée en termes généraux
La transaction dans laquelle les parties déclarent « être remplies de tous leurs droits, mettre fin à tout différend né ou à naître et renoncer à toute action relativement à l’exécution ou à la rupture du contrat de travail », comprend également les obligations liées à la clause de non-concurrence. Postérieurement à cette transaction, le salarié concerné ne pourra donc pas demander le paiement de la contrepartie financière à cette clause. C’est ce que précise la Cour de cassation dans un arrêt du 17 février 2021.
Depuis 2014, la chambre sociale de la Cour de cassation donne plein effet aux clauses générales par lesquelles les parties à une transaction conclue à l’occasion de la rupture déclarent être remplies de l’ensemble de leurs droits, mettre fin à tout différend et renoncer à tout recours lié à l’exécution ou à la rupture du contrat de travail. Dès lors qu’elle n’est assortie d’aucune exclusion expresse, une telle stipulation permet de tenir en échec toute demande ultérieure du salarié, quel qu’en soit l’objet.
Un salarié pourrait-il malgré tout réclamer le paiement de la contrepartie financière d’une clause de non-concurrence après avoir signé une telle transaction, en particulier lorsque l’employeur n’a pas pris soin de lever expressément l’interdiction de concurrence lors de la rupture du contrat ? Telle était la question posée à la Cour de cassation dans l’affaire tranchée le 17 février. Et la réponse donnée est négative.
- Transaction assortie d’une clause de renonciation générale
Dans cette affaire, peu après son licenciement pour motif personnel, une salariée avait signé avec son employeur un protocole transactionnel. Aux termes de celui-ci, les parties « reconnaissaient que leurs concessions réciproques étaient réalisées à titre transactionnel, forfaitaire et définitif, conformément aux dispositions des articles 2044 et suivants du Code civil, et en particulier de l’article 2052, ceci afin de les remplir de tous leurs droits et pour mettre fin à tout différend né ou à naître des rapports de droit ou de fait ayant pu exister entre elles ; et déclaraient, sous réserve de la parfaite exécution de l’accord, être totalement remplies de leurs droits respectifs et renoncer réciproquement à toute action en vue de réclamer quelque somme que ce soit ».
Le 27 juillet 2016, la salariée a malgré tout saisi la justice d’une demande en paiement de la contrepartie financière à la clause de non-concurrence. La Cour d’appel lui donne raison au motif que « l’employeur ne justifiait pas avoir expressément levé la clause de non-concurrence ». Par ailleurs, la transaction litigieuse ne comprenait « aucune mention dont il résulterait que les parties au protocole ont entendu régler la question de l’indemnité de non-concurrence due à la salariée ».
L’employeur se pourvoit en cassation en se basant sur l’effet libératoire d’une transaction rédigée en termes généraux, y compris à l’égard de la clause de non-concurrence. En effet, la salariée avait précisément « déclaré expressément renoncer à toute prétention, réclamation, action ou instance de quelque nature qu’elle soit, pouvant avoir pour cause, conséquence ou objet, directement ou indirectement, l’exécution ou la cessation des fonctions qu’elle a exercées au sein de la société ou du groupe auquel elle appartient ». La Cour de cassation lui donne raison.
- Effet libératoire à l’égard de la clause de non-concurrence, même sans levée expresse
L’arrêt du 17 février pose pour principe que « les obligations réciproques des parties au titre d’une clause de non-concurrence sont comprises dans l’objet de la transaction par laquelle ces parties déclarent être remplies de tous leurs droits, mettre fin à tout différend né ou à naître et renoncer à toute action relative à l’exécution ou à la rupture du contrat de travail ».
Autrement dit, cette transaction met fin aux obligations liées à la clause de non-concurrence, peu important qu’elle ne fasse pas expressément référence au sort de celle-ci. L’employeur n’a donc plus à en payer la contrepartie financière et le salarié à la respecter.
Avec cette solution, la chambre sociale conforte définitivement sa jurisprudence initiée en 2014 sur le plein effet des clauses transactionnelles de renonciation générale.
Source :Cass. Soc, 17 février 2021, nº 19-20.635