Pouvoir disciplinaire
Attention dans l’appréciation des règles en la matière (notamment les délais de prescription des faits fautifs et la limite de ce pouvoir , l’employeur s’entend également du supérieur hiérarchique direct du salarié, et ce quand bien même ce dernier ne serait pas titulaire du pouvoir disciplinaire.
C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans 2 arrêts du 29/06/2021 ; elle a précisé en effet : « que le supérieur hiérarchique qui a connaissance de faits fautifs d’un salarié doit être considéré comme l’employeur même s’il n’est pas titulaire du pouvoir disciplinaire, que ce soit pour le point de départ du délai d’engagement de la procédure disciplinaire (dans les 2 mois suivants la connaissance des faits par l’employeur), ou concernant la possibilité de sanctionner des faits antérieurs à une précédente sanction. »
1ère espèce : Dans cette affaire, un salarié avait été licencié pour des faits de dénigrement survenus en présence d’un formateur, et sur la base d’un rapport qu’avait fait ce formateur à la direction 11 jours après la survenance de ces faits. L’employeur a pris en compte cette date du rapport comme date de connaissance des faits, et le salarié a donc été convoqué à entretien préalable à sanction dans les 2 mois de ce rapport, mais plus de 2 mois après la survenance desdits faits litigieux. Le salarié soutenait que le formateur en question était son supérieur hiérarchique, et que dès lors le délai de prescription devait courir à compter de la survenance des faits ; il a donc contesté la sanction prononcée.
La cour d’appel, a retenu le jour du rapport à la Direction comme date de départ du délai de prescription de 2 mois. La cour de cassation n’est pas de cet avis, et censure l’arrêt de la Cour d’Appel pour manque de base en légale. En effet, les juges du fond auraient dû rechercher, comme le salarié le soutenait, si le formateur témoin des faits litigieux était effectivement son supérieur hiérarchique, afin de déterminer le point de départ du délai de prescription. La cour de cassation déclare dans ce cadre : « Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de 2 mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, ce dernier s’entendant non seulement du titulaire du pouvoir disciplinaire mais également du supérieur hiérarchique du salarié, même non titulaire de ce pouvoir. Une cour d’appel ne peut écarter le moyen tiré de la prescription du fait fautif sans rechercher comme elle y était invitée, si le formateur devant lequel les propos reprochés au salarié avaient été tenus, et qui en avait informé l’employeur, avait la qualité de supérieur hiérarchique de l’intéressé. »
2ème espèce : Dans cette autre affaire, un salarié avait reçu un avertissement de la Direction pour divers manquements. Que par la suite il a été convoqué à entretien préalable à licenciement avec mise à pied conservatoire en raison d’autres faits, mais antérieurs à l’avertissement. La coordinatrice du salarié (supérieur hiérarchique), qui avait connaissance des faits (objet de la procédure de licenciement) 4 jours avant la notification de l’avertissement n’en ont averti la Direction que plusieurs jours après.
Comme le rappelle la Cour de cassation, il résulte de l’article L1331-1 du Code du travail que l’employeur, qui ayant connaissance de divers faits commis par le salarié, considérés comme fautifs, choisit de n’en sanctionner que certains, épuise son pouvoir disciplinaire. Il ne pourra plus prononcer de nouvelle sanction pour des faits antérieurs à la 1ère sanction ; en ne les prenant pas en compte lors de la sanction notifiée, il a renoncé à les sanctionner ; et ce quand bien même en l’espèce, c’est en raison de la carence du supérieur hiérarchique que ces faits n’ont pas été portés à la connaissance de la Direction titulaire du pouvoir disciplinaire.
Sur cette base la cour de cassation a déclaré : « L’employeur, qui s’entend non seulement du titulaire du pouvoir disciplinaire mais également du supérieur hiérarchique du salarié, même non titulaire de ce pouvoir, s’il a connaissance de divers faits fautifs commis par le salarié et choisit de n’en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction. »
Sources :(Cf. Cassation sociale. 23/06/ 2021 – N°20-13.762 FS-B ; G c/ Sté GFK ISL Custom Research france) , (Cf. Cassation sociale. 23/06/ 2021 – N°19-24.020 FS-PB ; G c/ Association Caritas)